LES ARÈNES – Camille Perton
© 2024 - LES FILMS DU BAL / AUVERGNE-RHÔNE-ALPES CINÉMA
La loi du marché
Film sur le football sans football, oscillant entre thriller, film noir et chronique sociale, ce premier long-métrage révèle les talents de mise en scène et de direction d’acteurs d’une jeune réalisatrice.
Nombreux sont ceux qui ont essayé de s’attaquer au milieu du football au cinéma. La plupart ont vendangé devant le but. Grosse machine hollywoodienne pleine de bons sentiments (Goal, en 2005), biopic illustratif (Marinette, sur la footballeuse Marinette Pichon, en 2023), comédie inepte (3 zéros, en 2001) ou film-qui-aurait-pu-être-réussi-mais-en-fait-pas-vraiment (Mercato, un peu plus tôt cette année) : voilà beaucoup d’occasions manquées de transformer un sujet pourtant vaste et passionnant, qui va bien au-delà du sport, en cinéma. Avec Les Arènes, Camille Perton parvient, elle, à scorer.
D’abord parce que la jeune réalisatrice, dont c’est le premier long-métrage, fait un choix radical : de foot véritablement, au sens sportif du terme, il ne sera pas vraiment question ici. Certes, Brahim, 18 ans, est un joueur prometteur. Mais ce que l’on suit dans Les Arènes, ce sont surtout les tractations menées par son grand cousin, Mehdi, qui est aussi son agent, pour trouver le club qui lui donnera sa chance et le fera passer au stade suivant. Voilà un long-métrage fait de couloirs, de bureaux froids, de moquettes et de boîtes de nuit plus que de vestiaires et de pelouses.
© 2024 - LES FILMS DU BAL / AUVERGNE-RHÔNE-ALPES CINÉMA
Ce qui intéresse Camille Perton, ce n’est pas tant le ballon rond – quand bien même la réalisatrice est une supportrice émérite – que ce qu’il raconte de notre monde : les logiques capitalistiques violentes qui le gouvernent, les envies d’ascension sociale freinées en permanence, les codes de réussite qui s’apprennent dans la douleur, donc en échouant. Les Arènes s’affirme surtout comme un film noir, lorgne le film de mafia, en faisant intervenir des personnages troubles aux intentions douteuses, jusqu’à ce que les trahisons et l’acharnement du sort rappellent même la tragédie grecque, à laquelle le titre fait éminemment référence.
Si cela fonctionne, c’est d’abord parce que c’est très bien mis en scène, avec un sens du cadre impressionnant et une belle capacité à créer des atmosphères marquées. Sur un yacht luxueux comme dans une maison ultra-moderne, Camille Perton construit son image avec soin, isole ses personnages, introduit ce qu’il faut de stupre et de poisse pour que le malaise soit palpable sans virer au tapageur. La réalisatrice est aussi une très bonne directrice d’acteurs. Car si on ne doute plus, désormais, de la capacité de Sofian Khammes (qui joue Mehdi, le cousin et agent) à porter un film à lui seul, ou de celle d’Edgar Ramirez (Francis, un agent ambigu) à semer le trouble, le jeune Iliès Kadri marque aussi les esprits en jeune naïf jeté parmi les requins.
MARGAUX BARALON
Les Arènes
Réalisé par Camille Perton
Avec Iliès Kadri, Sofian Khammes, Édgar Ramírez
France, 2025
À tout juste 18 ans, Brahim, jeune footballeur prometteur, est représenté par son agent et cousin Mehdi. Il s’apprête à réaliser son rêve : signer son premier contrat professionnel à Lyon. Mais l'arrivée d'un puissant agent étranger rebat les cartes. Dans cet univers où tous les coups sont permis, même la loyauté a un prix.
En salles le 7 mai 2025.