UNE PLACE POUR PIERROT – Hélène Médigue
© 2024 Nord-Ouest Films – Christophe LARTIGE
En famille
Sans viser l’originalité stylistique ou scénaristique, Hélène Médigue livre un récit simple et touchant sur une femme qui se bat pour trouver une place en foyer pour son grand frère autiste. Un film sublimé par la performance du duo formé par Grégory Gadebois et Marie Gillain.
En tombant sur l’ordonnance de son grand frère Pierrot (Grégory Gadebois), Camille (Marie Gillain) se rend compte qu’il est victime de surmédication dans le foyer où il réside. Ni une ni deux, elle fait ses valises et l’installe dans son appartement parisien – une décision qui ne met pas très à l’aise sa fille Emma (Mathilde Briançon). Camille se trouve alors prise entre l’urgence de lui trouver un nouvel endroit adapté et l’envie de garder auprès d’elle ce frère avec qui elle entretient une relation fusionnelle.
Ce qui frappe en premier en regardant Une place pour Pierrot, c’est sa simplicité. Aucun élément n’est noyé dans le pathos (comme la condition de mère célibataire de Camille) ou surjoué avec gravité ou encore sensationnalisme (ce qui est malheureusement trop souvent le cas dans les représentations des troubles du neurodéveloppement). Au contraire, Hélène Médigue fait se succéder des scènes de vie ordinaires, parfois entravées par le handicap, le plus souvent non, sans nier le fait qu’héberger une personne qui a besoin de soins représente une contrainte. Cette vision nuancée – provenant probablement du vécu de la réalisatrice qui a elle-même un frère autiste et a déjà traité ce sujet dans le moyen-métrage de fiction C’est pas de chance, quoi ! (2012) – confère à Une place pour Pierrot une certaine légèreté, qui, outre le fait de faire franchement du bien, permet au film de dépasser son sujet et d’atteindre une dimension plus universelle.
Il n’est pas seulement question de trouver une place pour Pierrot. Hélène Médigue se sert de son arrivée pour faire bouger toute la fresque familiale (à laquelle s’ajoutent l’ex-mari de Camille incarné par Vincent Elbaz ainsi qu’un duo de restaurateurs drôles et bienveillants) et questionner la place de chacun. Camille repense son rapport au travail, à l’amour. Emma réalise qu’en pleine adolescence, elle a besoin d’espace et d’intimité. Quant à Pierrot, il a son mot à dire sur le lieu qui l’accueillera tout autant que des réflexions à formuler sur ses envies futures.
En posant autant de problématiques propres à chacun de ses personnages, Une place pour Pierrot peut donner une sensation d’inachevé dans sa dernière scène. Mais c’est aussi, peut-être, ce qui lui donne sa beauté, en montrant qu’aucun de ces questionnements existentiels ne peut émerger et se résoudre simplement le temps d’un film.
ENORA ABRY
Une place pour Pierrot
Réalisé par Hélène Médigue
Avec Marie Gillain, Grégory Gadebois, Patrick Mille
Pierrot, 45 ans, est autiste et vit dans un foyer médicalisé. Déterminée à lui offrir une vie digne, sa sœur Camille le prend chez elle et se met en quête d’un endroit mieux adapté à sa différence. Le chemin est long mais c’est la promesse d’une nouvelle vie, au sein de laquelle chacun trouvera sa place.
En salles le 10 septembre 2025.