Cannes 2025 - PROMIS LE CIEL - Erige Sehiri
©Maneki Films Henia Production
Terre promise
Dans son deuxième long-métrage, la réalisatrice tunisienne Erige Sehiri peint avec retenue le portrait de trois femmes, trois exilées, trois sœurs de lutte. Délicat comme de la porcelaine, il en partage aussi la fragilité.
Deux salles, deux ambiances. Alors que Tom Cruise, scientologue préféré du grand public, déchaînait les foules au Grand Théâtre Lumière pour Mission Impossible 8, la section parallèle Un certain regard s’ouvrait sur le second film d’Erige Sehiri, Promis le ciel. La réalisatrice tunisienne se tourne de nouveau vers sa terre natale – elle qui s’était intéressée aux récolteurs de figues dans le bien-nommé Sous les figues en 2022 –, et porte son regard sur une autre catégorie d’outsiders : les immigrées subsahariennes, et plus particulièrement sur trois femmes, Marie, Naney et Jolie. Pasteure, Marie tente de maintenir en vie son église contre vents et marées. Naney, elle, tente de se maintenir en vie tout court, et subvient à ses besoins en commettant de petits larcins. Quant à Jolie, elle vise l’ascension sociale en suivant des études d’ingénierie.
Autant de trajectoires déployées dans le film avec finesse, et qui atomisent la dichotomie xénophobe du bon et du mauvais immigré : Jolie, seule titulaire d’une carte de séjour et proche de l’intelligentsia universitaire, l'apprend à ses dépens. Face aux oppressions systémiques, personne ne peut sortir gagnant. Et dans la grande histoire de leur communauté se tisse la petite histoire de leurs intériorités, exécutées avec plus ou moins de succès. L’écriture de Promis le ciel n’est en effet pas dénuée de fragilité, ne va pas toujours jusqu’au bout, n’atteint pas toujours la cible, en raison de la densité des sujets abordés et d’une pudeur parfois excessive.
Néanmoins, le deuxième long d’Erige Sehiri tire son épingle du jeu en exaltant les vertus de la solidarité. La religion, notamment, y est traitée d’une manière rafraîchissante, en montrant ce que des minorités persécutées peuvent y trouver de lien social. Créer des espaces de communion, dans tous les sens du terme, c’est ce que Promis le ciel prêche.
« On m'a promis le ciel/En attendant j'suis sur la terre/On m'a promis le ciel/En attendant j'suis sur la terre/À ramer », comme le dit si bien Delgres.
LÉON CATTAN
Promis le ciel
Réalisé par Erige Sehiri
Avec Aïssa Maïga, Laetitia Ky, Deborat Christelle Naney
Ce film est présenté en sélection Un Certain Regard au Festival de Cannes 2025
Marie, pasteure ivoirienne et ancienne journaliste, vit à Tunis. Elle héberge Naney, une jeune mère en quête d'un avenir meilleur, et Jolie, une étudiante déterminée qui porte les espoirs de sa famille restée au pays. Quand les trois femmes recueillent Kenza, 4 ans, rescapée d'un naufrage, leur refuge se transforme en famille recomposée tendre mais intranquille dans un climat social de plus en plus préoccupant.
En salles prochainement