COMME A LA MAISON - Juillet 2023

Fini les sempiternels « Qu’est ce qu’on regarde ce soir ? » et les longues errances sur Netflix ! Chaque mois, on vous propose quelques recommandations de films ou séries disponibles en VOD ou SVOD à travers une thématique féministe, et/ou avec une femme derrière la caméra. Une chose est sûre, il y en aura pour tous les goûts.

Dans ce cahier de vacances, on retrouve une histoire d’amour dans le milieu du drag, une mère tourmentée, un court-métrage de la fraichement récompensée à Cannes Molly Manning Walker ainsi qu’un Bling Ring scandinave.


LA RECOMMANDATION DE… ALICIA

3 NUITS PAR SEMAINE - Florent Gouëlou - 2022

Disponible sur MyCanal (Ciné+) et en VOD

Synopsis : Baptiste, jeune photographe de 29 ans en couple avec une infirmière travaillant auprès des populations queers, rencontre un soir la drag queen Cookie Kunty. Un coup de foudre qui fait basculer son existence dans un nouvel univers. Baptiste va alors découvrir le milieu du drag et peu à peu lever le voile sur le garçon derrière les talons et le maquillage, Quentin.

Période estivale oblige, on a forcément un peu envie de faire la fête en ce mois de juillet. Nous, on vous propose une plongée inédite et lumineuse dans les coulisses de la scène drag parisienne avec 3 nuits par semaine. Une comédie romantique queer, on apprécie notamment que l’obstacle principal de cette histoire d’amour n’est pas le fait que Cookie Kunty/Quentin soit un homme mais la place que prend son personnage drag dans sa vie, derrière laquellle se cache aussi un fascinant film politique. Toutes les facettes de ce milieu méconnu se dévoilent au spectateur à travers le regard amoureux et admiratif du néophyte Baptiste (excellent Pablo Pauly) : les paillettes de la scène comme les longues phases de préparation/démaquillage dans les backstages, la précarité comme le militantisme. La sororité entre les reines de la bande de Cookie Kunty est également un des cœurs du film. Une force qui permet à cette tribu marginale de faire face aux attaques homophobes hélas quasi-quotidiennes, sujet que Florent Gouëlou n’édulcore pas. 

C’est ainsi la première fois dans un long-métrage français que la communauté drag queen est montrée avec un tel souci de réalisme. Il faut dire que le jeune cinéaste, déjà auteur d’une série de court-métrages remarqués mettant en scène des personnages drag, connaît son sujet : Florent Gouëlou performe lui-même régulièrement à Paris sous le nom de Javel Habibi. Que ce soit devant la caméra ou à des postes techniques, près de 40 artistes issus de la scène drag ont participé au film à ses côtés. À commencer par la révélation Romain Eck, alias Cookie Kunty, que vous pourrez aussi encourager cet été derrière vos postes de télé dans la saison 2 de Drag Race France !

ALICIA ARPAÏA


LA RECOMMANDATION DE… MANON

We Need To Talk About Kevin - Lynne Ramsay - 2011

Disponible sur FilmoTV

Synopsis : Eva a mis sa vie professionnelle et ses ambitions personnelles entre parenthèses pour donner naissance à Kevin. La communication entre mère et fils s’avère d’emblée très compliquée. A l’aube de ses 16 ans, il commet l’irréparable. Eva s’interroge alors sur sa responsabilité. En se remémorant les étapes de sa vie avant et avec Kevin, elle tente de comprendre ce qu’elle aurait pu ou peut-être dû faire.

Vous êtes récemment devenu parent ? Evitez We Need To Talk about Kevin. Après un démarrage assez boursoufflé, le film plonge dans un profond malaise. Ce n’est pas l’autopsie du cerveau d’un psychopathe mais celle de la peur et de la culpabilité de sa mère. La construction, à l’aide de flashbacks de plus en plus habiles, permet de présenter toutes les nuances possibles pour justifier les pensées d’Eva. We Need To Talk About Kevin est un kaléidoscope d’anecdotes de l’ordinaire qui, mises les unes à la suite des autres, bâtissent un drame fataliste, extrêmement sombre et troublant, sous le prisme du rôle extrêmement difficile d’une mère - et de ses limites.

Avec les excellentes interprétations de Tilda Swinton comme de tous les garçons jouant Kevin à plusieurs étapes de sa vie, l’œuvre s’impose rapidement comme étant le film le plus terrifiant autour de la maternité – et ce sans aucune utilisation du body horror !

MANON FRANKEN


LA RECOMMANDATION DE… LISA

The Forgotten C - Molly Manning Walker - 2020

En accès libre sur Vimeo ou Youtube

Synopsis : La pandémie se poursuit et Aisha se réfugie dans son appartement. Les visites à domicile d’amis et de membres de sa famille marquent les semaines qui passent alors qu’Aisha a de la difficulté à leur dire ce qui lui arrive. 

Récipiendaire de la Queer Palm et du prix Un Certain Regard lors du dernier Festival de Cannes pour How To Have Sex, son premier long-métrage de fiction, la réalisatrice britannique Molly Manning Walker proposait en 2020 un court-métrage percutant. The Forgotten C (co-écrit avec la productrice et réalisatrice, Jessi Gutch) fait partie d’une anthologie de films courts commandés en 2020 par le fonds d’aide et développement britannique The Uncertain Kingdom à la suite de la pandémie mondiale de Covid-19.

Molly Manning Walker pose sa caméra de l’intérieur vers l’extérieur d’un appartement de la banlieue londonienne. En pleine période de confinement les sorties sont limitées pour un jeune couple et on comprend rapidement qu’Aisha, la protagoniste principale, est malade. L’utilisation de ce dispositif intérieur vers extérieur, se concentrant essentiellement sur la vision de la jeune femme par sa large fenêtre, est brillante. La fenêtre en question est sa seule ouverture sur le monde dans un contexte solitaire et étouffant dont nous avons tous fait - malgré nous - l’expérience collective. Ce choix, ainsi que le format 4/3 du film, permettent une immersion visuelle et sensorielle dans un quotidien en suspens. La photographie est en lumière naturelle, douce. Les cadres choisis sont serrés, ils remettent au centre tous les sujets qui les traversent. En une quinzaine de minutes, une chronique familiale tragique est créée, faisant vivre sous nos yeux la vie d’un voisinage hétéroclite. Tout n’est que petites touches pudiques d’humanité chez Molly Manning Walker.

LISA DURAND


LA RECOMMANDATION DE… SARAH

Barracuda Queens - par Amanda Adolfsson - 2023

Saison 1 disponible sur Netflix

Synopsis : Dans une banlieue suédoise chic loin de Stockholm, Lollo, Amina, Mia, Klara et Frida, forment le gang des « Barracuda Queens ». Étudiantes et filles modèles le jour, les cinq adolescentes se lancent avec insouciance dans une série de cambriolages qui vise leurs voisins aussi riches que détestables, pensant qu’elles n’éveilleront pas le moindre soupçon.

Si les séries scandinaves sont connues pour leur production majoritairement policière, Barracuda Queens est une mini-série de 6 épisodes d’environ trente minutes, qui ne déroge pas à la règle bien qu'elle soit conçue pour être exportée, et présente donc certains éléments familiers.

Le scénario, qui se base sur des faits réels d’effraction dans de luxueuses maisons, fait écho à The Bling Ring de Sofia Coppola. Ce film retraçait l’histoire vraie d’un groupe d’adolescents de Los Angeles qui cambriolaient les résidences de célébrités ; la représentation d’une classe sociale huppée dépeignant le quotidien de jeunes filles privilégiées a parfois des airs avec la série américaine Gossip Girls, et ce gang de filles n’est pas sans rappeler le terrible « gang des plastiques » du teen movie Lolita Malgré moi de Mark Waters.

Barracuda Queens se démarque néanmoins par son exigence qualitative propre aux séries scandinaves et qui sont devenues une alternative pour celles et ceux qui sont lassé.es par les fictions made in USA. La série suédoise propose un traitement nuancé de ses personnages, pour lesquels nous parvenons à nous attacher, et dont le discours raconte et dénonce aussi l’époque dans laquelle nous vivons, notamment à travers des enjeux encore d’actualité tels que le sexisme, et les violences sexuelles. Sous ses airs de Teen-Series légère, Barracuda Queens apporte un vent de fraicheur, tout en offrant aussi un voyage dans le temps à travers les années 90, et la redécouverte d’une B.O rétro dont le célèbre titre My favorite game du groupe suédois The Cardigans est à écouter en boucle.

SARAH DULAC


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